Ingrid Morataya

Jeudi 21 Août

Nous nous levons vers 8h30 et le temps de déjeuner et de nous préparer, nous devons partir pour Guaté. Le voyage de trois heures trente est assez peu agréable car le bus est bondé et nous sommes soulagés d’arriver. Nous téléphonons à Ingrid qui nous dit qu’elle sera là à quatre heures moins le quart. Très bien, nous allons manger et lire. A quatre heures, elle n’est pas là et nous ne nous inquiétons pas trop, un peu trop habitués aux retards guatémaltèques. Mais cette fois-ci nous avons tort. A la demi, nous lui téléphonons et elle nous attend depuis une heure mais de l’autre côté de la rue, nous avions mal compris sa description du lieu de rendez-vous.
Elle nous parle au rythme des battements d’ailes d’un colibri mais nous arrivons à distinguer dans ce vrombissement le flot de paroles qu’il devrait être. Nous parlons de la situation de nos amies communes, les deux françaises et également du président de Terre ouverte, Bernard Gabory, que nous avons rencontré en mai.

Nous arrivons chez elle : une résidence de quelques centaines de maisons rassemblées dans un enclos fermé et protégé par des policiers. A l’intérieur, c’est une véritable résidence à l’américaine, comme on en voit de plus en plus également dans les villes françaises. Les maisons sont de qualité et tout aussi confortable qu’une maison européenne normale. Nous sommes assez surpris car c’est un tout autre monde que celui dans lequel on a vécu jusqu’alors. La maison de José, qui gagne pourtant bien sa vie est miséreuse comparée à celle-ci. Mais nous comprenons que notre amie est proche des standards occidentaux en matière de vie familiale. Divorcée, trois enfants qui iront tous à l’université, une maison dans une banlieue résidentielle, des téléphones dernière génération, internet. Ici nous pourrions tout aussi bien être aux Etats-Unis. En plus, comme elle reçoit beaucoup de gens, notamment beaucoup de français, elle a déjà une idée assez précise de nos habitudes. Son chien s’appelle Nicolas et parfois ils l’appellent Sarkozy, réminiscence d’un passage de quelques français.

Comme elle doit un peu s’absenter, nous discutons avec son fils. Il étudie à l’université San Carlos, la seule université publique du pays qui comprend néanmoins quelques sept antennes régionales. L’université représente tout de même 5% du budget de l’état, ce qui rassure un peu. En droit, elle n’est pas très bonne, mais bien sûr notre ami est dans une filière très sélective, bien meilleure. Dans la soirée, ils nous diront qu’ils sont de la classe moyenne basse. On a un peu du mal à y croire et on se dit que l’on manque vraiment d’informations sur ce pays. Au moins nous avons quelques questions, et ceci est déjà bien pour avancer dans notre réflexion.

Après nous être douchés et avoir bu beaucoup trop de café, nous mangeons avec ses enfants et jouons même à un jeu dont je m’excuse de ne pouvoir le citer par les deux noms que je lui connais : « le baisé » ou « la salope ». Apparemment les gens qui leur ont appris l’appellent le tarot africain. Ce faisant nous discutons beaucoup, sans gène tant ces gens sont faciles d’accès. Ils doivent être vraiment habitués à recevoir souvent.

J’en profite donc pour connaître l’opinion de mon hôte sur sa situation et celle des françaises avec Armando. Beaucoup d’informations se recoupent avec ce que je connais déjà. Après quelques semaines passées ici et beaucoup de personnes vues, on peut assez facilement voir le cheminement d’opinion. Et la sienne est celles qu’avaient Anne et Marie. Pas grand-chose de beaucoup plus intéressant que ce que nous avons déjà appris. Son opinion sur le microcrédit est intéressante : elle nous dit que les gens dépenseront une grande partie de l’argent sans réellement gérer leurs projets. Il faut les accompagner beaucoup plus. A vrai dire, il y a une véritable problématique ici : à quel point doit-on accompagner les gens. Ici, tous les responsables locaux ont un goût prononcés pour les « capacitacion », c'est-à-dire les formations que l’on apporte aux gens. Mais moi, j’en ai clairement marre que l’on apporte tout un tas de petites choses à ses gens, sans leur apporter la seule qui compte : apprendre à aller les chercher. C’est bien un apprentissage de la liberté et de l’émancipation que l’on doit apporter par une voie concrète, pas un nouveau mode d’esclavage avec un peu plus de revenus. Enfin, comme je le disais hier, nous sommes dans un flou complet en matière de politique et de philosophie qui la déterminerait. Notre approche souffre de deux choses : elle basée sur une idéologie peu claire et aucunement partagée par tous et sur une méthode empirique alors que nous n’avons pas d’expérience. Il nous faudra du temps et beaucoup de réflexion pour palier à tout cela. En attendant je décris les problèmes que l’on a rencontrés, comment nous les avons gérés, et surtout j’écoute. Sylvain est allé se coucher plus tôt, mais nous discutons ainsi jusqu’à une heure du matin.

3 commentaires:

Sylvain a dit…

Tiens, pour faire plaisir a Guillermo qui desespere de voir un commentaire sur ce blog, j'ajoute une petite note délatrice pour compléter la description de la journée : nous avons mangé au BURGER KING a midi. Voilà, un commentaire constructif sur le blog.

(( Message subliminal à tous ceux qui lisent ces lignes et celles de Guillaume, qui se donne beaucoup de mal rien que pour vous : postez des commentaires !!))

guillaume.virag a dit…

Ah bah voilà c'est ça la solidarité : dévoiler ma solitude et mes vices, :)
Pour le burger king, je tiens à préciser qu'il n'y avait que des fasts foods là où nous attendions.

nicolasmeunier a dit…

Vous auriez pu manger au Pollo Campero quand même...